De la vérité à la poésie

Par Audrey Aragnou

En tant que lectrice, ce que je cherche quand je lis de la SFFF c’est bien sûr un dépaysement. Mais ayant la chance d’être aussi de « l’autre côté », c’est-à-dire dans la création, je dois bien avouer qu’un écrivain n’est jamais vraiment hors-sol, et que ce sont les associations d’idées (parfois un peu saugrenues, en tout cas chez moi :)) qui transforment les influences dans lesquelles il baigne.

Le contexte historique ou sociologique nous influence forcément. Mais c’est aussi par un important de travail de recherche que nous menons que nous tissons la matière pour nos récits.

Ainsi, il faut se pencher aussi sur les actualités de la recherche, ou parfois, sur l’histoire des sciences. J’écoute des conférences, des podcasts, et je prends des notes en réalisant des croquis.
Par exemple, lorsque j’ai écris la nouvelle sur la Mongolie, j’ai effectué pas mal de recherches sur les métaux rares qu’on y trouvait, les relations entre les Chinois et les Mongols, jusqu’à finir dans une exposition de design qui traitait de l’habitat collectif, en particulier chez les peuples nomades.
J’ai également regardé de nombreux reportages sur les nomades, et lui des romans policiers qui m’ont aussi pas mal appris sur cet univers. J’ai aussi étudié le fonctionnement des centrales nucléaires, le retraitement des déchets.

Et puis s’est m^lée la poésie. Je me souvenais avoir vu dans une piscine une énorme bouée rose, qui ne savait pas trop si elle était un cygne ou un flamant. Et cet oiseau s’est invité dans ma nouvelle, au milieu des poneys des grandes plaines, des corgis rebelles.
Ensuite, on fait le tri. Entre tout ce qu’on a lu, qui ne nous appartient pas encore, mais que l’on va transformer par notre imaginaire.

De même, lorsque j’avais écrit Tête de bocal, j’avais beaucoup regardé de reportages sur les milieux extrêmes glacés, Arctique et Antarctique, les brise-glaces. Et le point de départ a été lorsque mon compagnon m’a taquinée un jour en me demandant si c’était encore l’araignée dans ma tête qui s’agitait. Je devais sûrement avoir encore eu une idée loufoque.

Depuis quelques mois, je creuse ainsi plusieurs pistes, qui me serviront peut-être pour le tome 3 du Fou, si je l’écris un jour. Les pirates, les milieux glacés (encore, toujours !!!), et pas mal de recherches ethnographiques. Je me rends souvent dans des musées, je vois des expositions, souvent au Quai Branly à Paris. Ou j’achète les catalogues d’exposition quand je ne peux pas m’y rendre. J’entoure les mots dans les livres, en me demandant comment je pourrai faire évoluer cette idée tout à fait réelle. Une de celles que j’ai beaucoup aimées était Songlines, au Quai Branly, sur les mythologies des peuples aborigènes. Les couleurs étaient très vibrantes et les récits m’ont beaucoup touchée. J’ai lu aussi de nombreux livres sur la peinture aborigène. Ce que j’en ferai, je ne sais pas encore; parfois, on suit des lignes, on note des idées… tout cela finit en mur de post-it dans mon bureau avant un jour de s’incarner dans des textes que vous lirez peut-être !

— Audrey