Gérer des corrections éditoriales

Par Andréa Deslacs

Quand un texte est sélectionné, on reçoit normalement une relecture éditoriale avec des suggestions et des contre-propositions. Sur le fond, ça peut être de raccourcir un passage, de le retirer, de le modifier ou de l’approfondir. Ça peut suggérer de retirer un personnage. D’approfondir un thème ou un personnage.
Sur la forme, il y a les corrections classiques : orthographe, grammaire, syntaxe, répétitions (et non, il ne faut pas toutes les retirer), verbes ternes (non là non plus il ne faut pas tous les retirer), niveau de langue des personnages.

Et le style.

Or le style, c’est aussi assez personnel, il faut à la fois garder sa patte et se dire qu’on s’adresse à un public qui ne vous aura pas par-dessus son épaule pour lire le passage avec votre phrasé, votre vocabulaire, vos néologismes ou régionalismes.


À mes débuts, je n’ai jamais trop réfléchi, et dans la volonté d’être publiée, j’ai toujours appliqué tout ce qu’on me demandait, alors que parfois je ne voyais pas ce qui gênait. Remplacer une phrase par une autre qui veut dire la même chose, ça ne me dérangeait pas et si cela sonnait plus juste dans l’oreille d’autrui, pourquoi pas.


J’ai toujours détesté les remarques « phrase avec style à revoir / phrase moyenne » car elles ne définissent pas le problème : c’est quoi qui coince ? La longueur ? Une expression mal utilisée, une tournure compliquée ou ambiguë dans le contexte syntaxique, un effet non naturel à l’oral, un niveau de langue non adapté à un personnage ou à une narration, un rythme trop long qui coupe une action, un style haché qui va trop vite ou semble superficiel pour faire dynamique ? Je réclamais des explications.


De nos jours, je trouve que les auteurs ont plus de force pour dire « non », mais parfois je me demande s’ils ont autant raison que cela de vouloir qu’on ne touche pas à leur texte ou si c’est de l’orgueil. Ils veulent qu’on respecte leur récit et leur style, je le comprends. Mais la communication, ça se fait dans les deux sens. Si un passage a gêné un correcteur ou un éditeur, ne faut-il pas aussi se poser la question de « pourquoi ? » ou de « comment puis-je améliorer cela puisqu’il y a un point de litige ? » Je peux ne pas accepter la modification proposée, mais puis-je moi-même trouver quelque chose de nouveau qui convient à moi comme à eux ?


Souvent, les jeunes écrivains quand ils reçoivent des commentaires sur des rajouts d’univers ou d’événements prennent peur, car ils pensent devoir ajouter une succession de paragraphes pour expliquer ce qui leur est demandé. Dans une nouvelle, une phrase suffit, parfois deux, mais souvent il ne faut pas les inclure à l’endroit du texte où a été faite la remarque, mais en amont
Et si vraiment, c’est « non » à ce qui est demandé, le plus simple est d’expliquer pourquoi en une phrase. Sans s’étendre, sans être fallacieux, en demandant si vraiment cela est de l’ordre du détail ou de l’essentiel.


Un éditeur passe du temps sur des corrections, il a aussi une ligne éditoriale à tenir, et ça on le sait quand on s’adresse à lui.


Parfois il y a des rencontres qui sont un peu houleuse avec des sentiments mutuels de ne pas se comprendre, et puis il y a de très belles rencontres, enrichissantes et porteuses, qui ont permis de mettre en valeur et de donner toutes les pistes possibles d’amélioration pour un récit pour le rendre le meilleur possible. Et c’est toujours des moments exceptionnels qui mettent du baume au cœur.

— Andréa