Je, tu, il… iel, ael ?

Par Hermine Lefebvre

En tant qu’auteurices, nous pouvons vouloir créer des personnages non-binaires ou utiliser une écriture plus inclusive, mais il n’est pas toujours évident de bien s’y prendre. Cet article n’a pas pour but d’être exhaustif sur le sujet, mais d’aborder quelques points importants… et surtout les questions qu’ils soulèvent.

La question des pronoms – et ce que cela dit de vos univers

Le pronom neutre le plus connu et le plus utilisé est « iel », qu’on retrouve dans plusieurs romans. Il en existe de nombreux autres : ael, ille, ul, ol… Il n’y a pas de choix qui vaille mieux qu’un autre : cela dépend de vos univers et des ressentis de vos personnages. Ainsi, dans mon roman Sous le sceau de l’Hiver, j’ai fait le choix du pronom ael pour le personnage de Camille car ael trouvait que cela représentait davantage son identité, mais c’est purement personnel. Dans mon roman à paraître, La Cité oubliée, j’emploie le pronom ille, car le roman se déroule dans une Venise imaginaire où la société reconnaît trois genres : féminin, masculin et neutre, ce qui conduit facilement à une construction des pronoms et des noms communs en a/o/e (et un pluriel général en i).

Rien que se poser la question du choix du pronom et la façon dont il s’inscrit dans l’univers de votre roman (initiative de personnages concernés ou déjà intégré dans la société) en dit donc déjà beaucoup sur votre personnage et votre monde !

La question des accords et de l’écriture inclusive

Celle-ci ne se résume pas au point médian, loin de là. Les formes épicènes (camarade plutôt que compagnon, élève plutôt qu’étudiant ou étudiante) ou la double flexion (étudiantes et étudiants, toutes et tous) sont déjà des formes d’écriture inclusive.

La langue française étant particulièrement genrée, la question des accords se pose rapidement. Là aussi, les possibilités sont multiples :

— alterner entre accords féminins et masculins ou utiliser seulement l’un ou l’autre selon les préférences du personnage.

— ne pas utiliser d’accords : « je me réjouis » au lieu « je suis content/contente ». Cela peut paraître difficile au début, mais c’est surtout une habitude à prendre. Plutôt qu’un « curieux/curieuse », on peut dire « sans cacher sa curiosité, iel… ».

— réinventer complètement la grammaire ! C’est le choix notamment d’Auriane Velten dans After® qui utilise une grammaire inclusive. Et on s’y habitue très vite.

Réfléchir à l’identité de nos personnages nous amène ainsi à offrir davantage de représentations aux lecteurices, mais aussi à creuser nos univers.