Par Catherine Loiseau.
On voit passer souvent cette interrogation sur les réseaux sociaux et les forums: est-ce mal si une histoire a un prologue ?
De ce que j’ai pu lire à droite ou à gauche, les avis sont partagés.
Il y a les contre : beaucoup d’auteurs chevronnés déconseillent les prologues. Il faut dire que la tartine de cinquante pages sur la création d’un monde et sur les mœurs des différents peuples n’a plus vraiment les faveurs du public. C’était bien du temps de Tolkien, mais la manière de raconter les histoires a évolué.
Ils ont raison, et je me range plutôt dans cette catégorie, mais j’y reviendrai plus bas.
Mais il y a aussi les pour : certains disent qu’en écriture il n’y a pas vraiment de règles fixes, que de toute façon c’est réducteur de vouloir s’interdire des choses sous prétexte que ça se fait ou ne se fait pas et que la personne la plus à même de décider ce qui est bon pour l’histoire, c’est encore l’auteur.
Eux aussi ont raison (oui, je sais, je ne vous aide pas).
À titre personnel, les prologues ont vite tendance à me gonfler. Soyons honnêtes, très souvent, ça ne sert pas à grand-chose dans l’histoire. C’est une mise en bouche qui devient rapidement longue et je n’ai qu’une seule envie : passer ces pages pour entrer directement (ceux qui ont lu La Roue du temps me comprendront).
Dites-vous aussi que les éditeurs font souvent le tri sur les premières d’un manuscrit : si l’histoire ne se met pas en place rapidement, même si la suite est très bien, le manuscrit ne franchit pas le pas. C’est moche, mais c’est comme ça.
Brandon Sanderson a d’ailleurs expliqué qu’il a dû attendre d’avoir une carrière bien établie et un lectorat fidèle avant de tenter une histoire avec plusieurs prologues pour The Stormlight Archive.
Malgré tout, le prologue peut avoir son charme et bien fonctionner (je pense notamment au Trône de fer, qui m’a tout de suite plongée dans l’histoire).
Si vous voulez absolument un prologue à votre histoire, libre à vous. Vous êtes l’auteur, c’est votre texte, donc votre choix et votre responsabilité. Mais à mon humble avis, posez-vous quand même les questions suivantes :
— Est-ce que ce prologue sert vraiment à quelque chose dans l’histoire (sous-entendu, délivre-t-il des informations, ou met-il en scène des personnages par exemple) ?
— Est-ce qu’il est raccord avec l’histoire (est-ce que les éléments présents vont avoir un impact sur la suite) ?
— Est-ce que si vous supprimez ce prologue, cela change-t-il quelque chose à l’histoire ?
Si vous répondez « oui », alors écoutez votre instinct et foncez (j’ai un prologue pour un de mes romans. D’une page, certes, mais un prologue quand même !).
Si vous n’êtes pas sûr mais que vous en avez envie quand même, écrivez votre prologue (on répète : votre texte, vos choix).
Ça vous aidera à vous mettre dans l’histoire et si vous en avez envie, surtout, faites-le ! Faites ensuite travailler vos beta lecteurs et écoutez leur retour. Si ça marche, tant mieux, faites une danse de la victoire et célébrez ça.
Si ça ne passe pas, et bien il sera toujours temps d’appliquer les sages conseils de Lionel Davoust…
— Catherine