Aujourd’hui, les mystères de la couverture de La Déferlante se dévoilent !
Mes couvertures ? Elles sont belles, n’est-ce pas ? Elles happent l’œil sans tomber dans la luxure ni dans les figurines kawaï. C’est que ça vend un livre, une bonne couverture. Elle porte l’originalité du récit, le type d’univers dans lequel il prend place, elle tisse d’emblée le lien entre le lecteur et l’œuvre.
Le premier défi, c’est de trouver un illustrateur dont le style colle à l’histoire. Cela nécessite de longues (et fastidieuses) recherches par les Hydres. Et puis, comme une phrase peut tomber juste, au point qu’aucun mot n’est plus à changer, on trébuche sur une évidence. Alors, il convient de s’assurer que l’artiste exerce toujours et que son carnet de commandes est compatible avec le planning de publication ; qu’il répond quand on le contacte. Ce n’est pas toujours gagné, auquel cas on poursuit les recherches jusqu’à tirer le bon numéro.
Ensuite, il y a les conditions de commande. Ainsi, pour nos éditions numériques, il faut une cession mondiale des droits. Pour le papier, on peut réduire aux pays francophones, mais nous avons parfois des commandes d’expatriés, et ce serait dommage de ne pas pouvoir leur envoyer l’ouvrage au motif qu’on n’a pas les droits pour le pays où ils résident. Ces critères peuvent influer sur le prix.
Le principal critère, cependant, est le nombre de reproductions autorisées. Si le livre devient un best-seller, il est légitime que l’artiste récolte plus d’argent que le coût initial de la commande. Les illustrateurs ont des seuils différents, il faut juste s’assurer que ce soit réalisable, car on gagne peu sur un livre papier : il y a d’abord l’impression, dont les prix se sont envolés ces dernières années, et surtout les coûts postaux qui montent vite à 7-9 € pour expédier un exemplaire. Quand il n’y a pas La Poste, il convient de compter les frais d’inscription aux salons et de déplacement. Bref, on doit vérifier qu’on arrivera à honorer les droits de l’illustrateur avec la marge de la vente. On ne vit pas de l’écriture, donc on va éviter de s’endetter par la même occasion.
Ensuite vient l’étape du brief. D’abord en interne, parmi les Hydres, pour s’accorder sur les éléments qu’on souhaite mettre en avant et s’assurer que c’est pertinent. Puis avec l’artiste : expliquer le récit, et les éléments qui sont à positionner sur la couverture, la symbolique, des exemples d’illustration pour clarifier ce qu’on a en tête. Le gabarit aussi : la place réservée au titre, celle où on trouvera le logo Hydralune, etc. J’ai connu des illustrateurs qui ont renoncé à ma commande, car ce que je demandais leur paraissait trop compliqué, surtout pour quelques centaines d’euros. Cela conduit à se remettre en question (mais qui sait, un jour, mes ventes me permettront peut-être de commander une toile de 12 mètres par 3 pour illustrer les scènes épiques 😀 )
On verse tout cela dans la marmite de l’illustrateur, qui va bouillonner d’imagination pour produire quelque chose qui réponde à tout cela dans son propre style. Je lui laisse alors toute latitude pour inclure ou non les éléments que j’ai donnés et trouver ce qui lui paraît le mieux, car c’est son job. C’est lui ou elle qui sait illustrer, pas moi.
Pour mes deux couvertures, j’ai été bien servi ! Yanis Cardin a illustré majestueusement la Déferlante, avec le combat devant la bibliothèque de l’université. On y voit la statue de la connaissance, avec son livre ouvert. Il y a le doyen qui a sorti une arme de siège et massacré la foule. Un dragon dans le ciel, qui viendra clore le duel entre les deux amoureux qui ont choisi chacun de rallier un camp différent. L’éclairage est juste parfait. Cela donne vraiment envie de découvrir l’histoire, n’est-ce pas ?
Alors, c’est la fabrication qui va sublimer ou déprécier l’illustration. Sur la première impression, les couleurs et le type de pelliculage ont terni (au sens premier, ôter l’éclat et l’intensité) le rendu. Les impressions suivantes, sur un autre matériel et avec un pelliculage brillant, nous ont offert un bien meilleur rendu, qui se traduit en nombre de ventes.
La deuxième couverture, encore secrète à cette heure, change complètement de style. On passe de la fantasy à la science-fiction de brève anticipation. Il fallait donc quelque chose de bien plus moderne, avec des références à des éléments connus. L’approche graphique de Brian Merrant, entre le photomontage et le dessin, nous a séduits. Il avait la tâche difficile de passer du désespoir au rayon d’espoir, avec une touche de science-fiction, mais pas trop, car le récit se déroule dans un futur assez proche. L’héroïne se trouve sur le chemin entre l’ombre et la lumière, chemin qu’elle se taille à coup de Glock. La voir ainsi, avec son visage juvénile et ses deux pistolets fétiches reflète l’ambiance du roman, mais je ne peux pas en dire plus pour le moment 😉
NB : l’ouvrage étant sorti à présent, nous vous présentons la couverture en question 🙂
— Iphégore